Témoignages

Le mot de Myriem Hajoui

Journaliste, collabore entre autres à Cassandre et la Terrasse, spécialisés dans les Arts vivants.


On voit ici les mauvais coucheurs maugréer à la seule lecture du titre et tourner casaque in petto. la fatalité des banlieues, la misère nichée dans les cages d’escaliers, l’exclusion, les destins abîmés ... très peu pour eux...


Dommage ! ils passent à côté d’un texte de Jean-Louis Bourdon (grand sculpteur de langue) mis en scène par Marc-Ange Sanz (auteur du superbe Un pur moment de Rock’n’roll).


Véritable fable humaine, la pièce relate effectivement le plan «misère-galère» : la mère ancien prix de beauté à Pont-Lévèque, le coeur au bord des lèvres en attendant le père, coureur de jupons, les enfants s’inventant des histoires et des rêves de bonheur, histoire d’oublier les torgnoles. Mais dans cette maison écrasée par la souffrance, pas de chappe de plomb cafardeuse, on parle, le rire féroce plein à fleur de gorge, les mots cinglants comme des gifles.


Avec sa tendresse sèche Bourdon nous touche, là direct aux fibres charriant un chapelet de questions autour de la désintégration sociale, l’exclusion...


Grâce à la mise en scène frissonnante de Marc-Ange Sanz chaque scène est d’une évidence et d’une acuité dévastatrice.

Rien à voir avec ces spectacles que l’on absout de tous leurs défauts sous prétexte qu’ils sont branchés sur l’air du temps.


Celui-ci nous offre en quelques lignes pures le tremblé de la vie, le friselis de la misère ordinaire, l’écho du monde tel qu’il court en ce moment...                                                                     

Myriem Hajoui






Le mot de Vincent Vial

Journaliste, collabore entre autres à The Lion.


Un brin de Zola, un salut à Bruant, du film noir mais surtout pas d’attendrissement. On donne à voir, on ne juge pas.


La force de ces monologues enchevêtres comme des moellons qu’on installe les uns à côté des autres pour bâtir le mur, a de la conviction et traîne le rêve dans le ruisseau.


Le travail de Marc-Ange Sanz y aide profondément. Pas moyen de faire mieux tout en restant efficace. Pas d’effets forcés ou tarabiscotés, mais une poigne de fer qui dirige d’admirables acteurs immergés de tout leur coeur dans leur misère et leur lumière.

Vincent Vial

Scènes de la misère ordinaire

de Jean-Louis Bourdon